DÉTOURNEMENT D’AÉRONEF

DÉTOURNEMENT D’AÉRONEF
DÉTOURNEMENT D’AÉRONEF

DÉTOURNEMENT D’AÉRONEF

Forme particulière de piraterie, le détournement d’aéronef est limité dans le temps et dans l’espace. Contrairement aux voiliers du XVIIIe siècle, un avion a une autonomie et un nombre de points d’arrivée limités: il ne peut disparaître aux yeux de tout le monde et le moment de quitter l’appareil est en principe un moment critique pour les auteurs du détournement. De plus, la grande majorité des détournements d’aéronefs est effectuée dans un but politique; or on ne peut, du point de vue du traitement pénitentiaire, assimiler le délinquant politique à un délinquant de droit commun. Avant la loi du 15 juillet 1970, le détournement d’aéronef n’était pas punissable en droit français: à la rigueur, l’article 307 du Code pénal, ayant trait aux mesures verbales faites avec ordre sous conditions, était applicable; mais la sanction prévue, une peine d’emprisonnement de six mois à deux ans et une amende de 500 à 1 800 francs, ne semblait pas appropriée au détournement d’aéronef. Un jugement du tribunal de grande instance de Corbeil avait, le 12 mars 1969, condamné les auteurs d’un détournement d’aéronef sous le chef de violences et voies de fait avec préméditation et de détention illégale d’armes. Mais la peine ne s’était élevée, à défaut de texte spécial, qu’à quelques mois de prison, bien que le tribunal ait reconnu que «... cette action comportait de grands dangers, qu’elle fut de nature à compromettre et avait compromis la sécurité de l’aéronef, de personnes à bord et de la navigation aérienne...»

Devant cette carence législative et devant l’augmentation considérable des détournements fut votée, le 15 juillet 1970, une loi qui insérait dans le Code pénal un article 462 spécifiant ce type d’infraction. Étendues ensuite à d’autres cas, ces dispositions se retrouvent dans l’article 224-6 du nouveau Code pénal, lequel punit «le fait de s’emparer ou de prendre le contrôle par violence ou menace de violence d’un aéronef, d’un navire ou de tout autre moyen de transport à bord desquels des personnes ont pris place [...] de vingt ans de réclusion criminelle». Cette infraction est punie de la réclusion criminelle à perpétuité «lorsqu’elle est accompagnée de tortures ou d’actes de barbarie, ou s’il en est résulté la mort d’une ou de plusieurs personnes». La loi de 1970 exigeait que l’avion fût en vol, ce qui souleva des difficultés d’interprétation, nombre de détournements ayant en effet lieu alors que l’aéronef est encore sur la piste d’envol; la loi ne s’appliquait-elle pas alors, sous prétexte que l’avion n’était pas à proprement parler en vol?

Pour pallier cette insuffisance, la loi du 5 juillet 1972 précisait qu’«un aéronef est considéré comme en vol depuis le moment où, l’embarquement étant terminé, toutes ses portes extérieures ont été fermées jusqu’au moment où l’une de ces portes est ouverte en vue du débarquement. En cas d’atterrissage forcé, le vol est censé se poursuivre jusqu’à ce que l’autorité compétente prenne en charge l’aéronef ainsi que les personnes et biens à bord.» Le nouveau Code pénal de 1992 ne mentionne plus le vol comme élément constitutif de l’infraction.

Les tribunaux français sont compétents pour connaître du délit dans tous les cas s’il a été commis à bord d’aéronefs français; si le délit a été commis à bord d’un aéronef étranger, la loi française demeure cependant compétente lorsque l’auteur de l’infraction est français, lorsque la victime est française (donc dès qu’il y a un Français à bord), lorsque l’avion a atterri en France. Mais un détournement d’aéronef est susceptible de susciter de nombreux conflits de compétence internationale, d’origine tant juridique que politique. Aussi les conventions internationales se sont-elles multipliées! La première est celle de T 拏ky 拏 (14 sept. 1963), ratifiée par la France le 11 juillet 1969 et rendue applicable en France le 19 février 1971. On y retrouve les mêmes termes que dans la loi française, mais la formule «les États contractants prennent toutes mesures appropriées pour restituer ou conserver le contrôle de l’aéronef au commandant légitime» (art. 11) est dénuée de portée. Aussi deux nouvelles conventions ont-elles été signées, qui contiennent des clauses pénales, le 16 décembre 1970 à La Haye, et surtout, à quelques jours d’intervalle, à Montréal où cinquante États, dont la France, furent signataires. Enfin, la convention d’extradition réciproque, signée le 8 avril 1971 entre la France et les États-Unis, a une incidence sur notre sujet puisque parmi les causes classiques d’extradition (abus de confiance, escroquerie, vols, recels, enlèvement de mineurs, infraction à la législation concernant les stupéfiants, banqueroute) est prévue la révolte à bord d’un aéronef contre l’autorité du commandant de bord et le fait de s’emparer ou d’exercer le contrôle d’un aéronef par violence ou menace de violence.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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